25.1.15

La balade du dimanche soir... A Delaune (ou la première fois d'une Rémoise, au stade)

 

Ne sois pas impatient, Grand-Père. Te souviens-tu ? Avant le match, il y a l'avant-match. 

Au bar Le Stalingrad, du rouge, du blanc. On entre, on sort : effervescence des grands soirs. Tablées de supporters. Père et fils, groupes d'amis. Ici, un Picard portant les couleurs de Lens, au milieu d'une joyeuse bande de Rémois.

Bonnets, écharpes à gogo. En as-tu jamais possédé une ? 


Du rouge sur ma bouche. Et sur mes joues aussi. Tant je suis couverte pour affronter le froid de ce 25 janvier. 

Les pronostics des pros du ballon rond vont bon train : 3-1 à droite. 2-0 à gauche. Nous voilà rassurés : dans tous les cas, les "Rouge & Blanc" sont donnés gagnants. 

Dehors, les Lensois font du bruit. Fumigènes et chants patriotiques. Les sirènes retentissent. Pas question de se laisser impressionner. Quoique... 

16 h 30. Des cohortes d'hommes affluent de toutes parts. Les rangs grossissent. Plane ce sentiment étrange et fort de curiosité mêlée d'impatience. Tous sommes aspirés par le stade, motivés par la perspective de vivre ensemble, quelque chose de beau. 



Mais d'abord, il faut atteindre les tribunes. Cela relève du parcours du combattant. 

Imaginez le sort réservé aux malheureux qui rejoignent Delaune par le coeur de ville et la rue de Vesle. Le trottoir est bouclé. Une seule solution : passer par le parc, comprenez une butte de terre détrempée à négocier, sans tomber... 

Des centaines de supporters se lancent dans un bourbier innommable, vers de terre et gadoue. Quel premier rendez-vous. 

Est-ce digne d'une ville comme la nôtre ? L'art de vivre à la Rémoise... Oui, je sais, je râle et j'abuse.

Quelle idée d'être une femme, de venir au stade et d'avoir privilégié les talons aux crampons ? 

Grand-Père, tu ne m'as jamais emmenée. Finalement, peut-être que le foot reste encore aujourd'hui une affaire d'hommes.   


Entends-tu la clameur ? Pressons le pas. Tribune Jonquet, nous voilà. 

Un sourire d'enfant ne quitte pas mes lèvres. J'y suis. La magie des premières fois. Je pense à toi. 




Ultimes formalités : 1/montrer patte blanche 2/les bras en l'air (précision, les dames sont fouillées par les dames ) 3/monter les marches quatre à quatre. Et puis... Le spectacle tant attendu, la vue, l'arène, l'air vif, la neige, les couleurs et l'ambiance. 





#SDRRCL. Coïncidence ? La fille qui aime la mer se retrouve place 56 (MorbihanMonAmour). 

A la fois, il y a l'embarras du choix. Je me demande si tu avais tes habitudes. 





Le match commence. Mais où donner de la tête ? Mon regard balaye la pelouse, les hommes, les lieux. Je veux tout voir, tout boire.

D'emblée, dans les tribunes, les Lensois impressionnent. On serait presque tenté de chanter avec eux, tant ils sont admirables d'énergie, d'enthousiasme et d'unité. 





Mais nous sommes pour l'autre camps. Justement, que fait l'autre camps ? Si peu. Chants faiblards, applaudissements timides. Même les provocations des visiteurs ne suscitent aucune réelle réponse. Les drapeaux rouges restent en berne. 

J'avoue être surprise. Cela est si éloigné de l'idée de communion, de bruit, de mouvement que je me faisais d'un match en live.  

L'arbitre siffle la fin de la première mi-temps après 45 minutes sans saveur. Les joueurs de Reims apparaissent exténués par une semaine marathon. Tant pis. Pour moi, le spectacle est ailleurs.

L'édifice est magnifique. De ces architectures épurées qui font la part belle au béton.  

Plus rien à voir avec ce vélodrome où tu as joué, jeune homme. 












On s'agite à la buvette. Un chocolat providentiel nous réchauffe.  



La deuxième mi-temps ne s'annonce guère plus palpitante que la première. Pourtant les Lensois jouent l'offensive. Les sang & or poussent les rouge & blanc en défense. Les occasions se multiplient pour les gars venus du Nord. 

Le match se concentre sur la cage de notre gardien. Johny Placide. 




Aujourd'hui, les quelques mètres qu'il doit défendre ressemblent à un champ de bataille. 

L'homme en bleu à la chaussure rose, lui, a d'autres préoccupations. Pas de quoi se refroidir. Les ballons fusent. 

Des milliers de paires d'yeux sont rivées sur lui. Son agilité, son style, sa précision nous régalent. A chaque attaque, des rangées entières de spectateurs se lèvent pour mieux voir agir celui de qui dépend l'issue du match.  

Placide c'est un peu le dieu du stade. Aucun ballon ennemi ne lui échappe. Et la chance ne le quitte pas d'une semelle. 

Dois-je y voir un signe ? Grand-Père, tu occupais ce poste autrefois. Sans doute es-tu aux anges quelque part. 

Sur le panneau lumineux, le score lui aussi refuse de bouger. Reims - Lens. 0-0. Pas mieux. Le match est terminé. 






Ce soir, pour la première fois, je suis venue, mais sur la pelouse comme dans les tribunes, les Rémois n'étaient pas vraiment là.




Homme engagé, mon Grand-Père était de ceux qui soutiennent quoiqu'il advienne. 

Delaune, je reviendrai.   














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